Quand Deleuze parlait du diaporama sonore*

Gilles Donada
Diapéro
Published in
2 min readDec 24, 2017

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En mai 1987, le philosophe Gilles Deleuze donne une conférence à l’école de cinéma parisienne, la Fémis : “Qu’est-ce que l’acte de création ?”. “L’ idée proprement cinématographique” est, dit-il, “la disjonction du visuel et du sonore”, du son et de l’image.

Citant les oeuvres des Straub, Duras et Syberberg, il explique : “On nous parle de quelque chose, on nous fait voir une autre. Ce dont on nous parle est sous ce qu’on nous fait voir.” Autrement dit, la voix (ou le son) nous raconte une histoire, les images nous montrent un autre récit et la confrontation des deux nous délivre un nouveau message qui n’est pas l’addition des deux. Le son et l’image sont dans un “rapport indirect libre” dit encore Deleuze dans ses cours sur “cinéma et pensée”.

Ces considérations appliquées au diaporama sonore invitent le réalisateur à ne pas systématiquement employer de façon redondante l’image et le son : on entend ce qu’on voit, on voit ce qu’on entend. Plate illustration. Toute la force d’évocation provient du décalage, de la “disjonction”, entre le son et l’image.

Le photographe Mathias Benguigui (également membre de Diapéro) a joué à fond cette disjonction dans ce reportage en donnant uniquement la parole à des femmes de chasseurs et en photographiant ces derniers sur le terrain.

*Le titre de ce billet est légèrement survendu…

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Journaliste. Co-fondateur de http://diapero.com. Créateur des podcasts Intimi~T https://medium.com/intimi-t. Photo : Mathias Benguigui/09.2018